Le passé Minier
Historique de l’exploitation charbonnière sur la commune de Camplong
Il est possible de distinguer trois phases principales dans l’histoire minière de Camplong :
- du 18e siècle au premier quart du 19e siècle : exploitation des gisements situés, pour la majorité, sur la rive droite de l’Espaze, à destination du marché local,
- des années 1840 au milieu du 20e siècle : sous l’impulsion de la Compagnie générale du bassin houiller de Graissessac puis de la Compagnie des Quatre mines Réunies de Graissessac, exploitation des gisements houillers par galeries et puits pour le marché local et régional, extension des sites d’exploitation sur la rive gauche de l’Espaze et sur le versant nord de Camp Nègre,
- de 1956 à 1993 : exploitation en découvertes et fin définitive de l’activité.
Le sud du territoire communal actuel de Camplong faisait partie de la concession de Boussagues, créée en l’an XII (1803) [1]. Les premiers exploitants de la concession de Boussagues sont les sieurs Moulinier et Giral (puis Société des Mines de Boussagues). Dès les années 1840, ils s’associent à la Compagnie Usquin qui détient alors des parts majoritaires dans les concessions de Saint-Gervais, du Bousquet et du Devois. Ils forment, en 1845, la Compagnie générale du bassin houiller de Graissessac qui devient Compagnie des Mines de Graissessac en 1860 puis Compagnie des Quatre mines réunies en 1863. La création de ces compagnies privées est à l’origine, pour partie, du développement de l’activité extractive. Sur le territoire actuel de la commune de Camplong, 4 mines sont mentionnées sur la première levée du cadastre napoléonien, en 1826 (mine de la Goutine, mine Adèle, mine Saint-Etienne, mine Poupon). En 1843, Napoléon Garella en mentionne 5 (mine de la Goutine, mine Adèle, mine Saint-Etienne, mine Poupon, mine Sainte-Marguerite). A la tête des concessions de Saint-Gervais, du Devois de Graissessac, de Boussagues et du Bousquet, la Compagnie des Quatre mines réunies rationalise la production à l’échelle du bassin (excepté les concessions de Castanet-le-Haut et Saint-Geniès, jusqu’en 1927). Elle fait de Graissessac [2] son centre de décision et de traitement du minerai. Le charbon des mines de Camplong transite alors vers le Clédou où, une fois traité, il est expédié sur les marchés méditerranéens et atlantiques via la gare de Graissessac-Estrechoux inaugurée en 1858.
C’est à partir du dernier quart du 19e siècle que l’activité connaît un essor à Camplong, quelques décennies après Graissessac. La population de Camplong passe de 923 habitants en 1862 à 1685 habitants en 1881. Aux familles d’origine paysanne s’ajoute une population venant de l’Aveyron et de la Lozère [3]. Cependant, cet essor n’est pas comparable à celui observé à Graissessac, puis quelques années plus tard au Bousquet : « le secteur de Camplong, siège pourtant de réserves importantes, ne réussira pas quant à lui à améliorer les conditions extérieures d’exploitation, son développement ne se réalisera que lorsque les infrastructures souterraines permettront l’acheminement du charbon vers les centres de traitements, d’abord vers Graissessac, puis vers le Bousquet d’Orb [4] ». La fermeture des dernières galeries à Camplong en 1967 (mine Vignères), qui s’accompagne d’un déplacement du centre de décision et de traitement du minerai vers Le Bousquet d’Orb, marque un arrêt dans le développement de la commune.
Au cours des années 1950, la modernisation de l’exploitation, par le groupe des Houillères du Bassin des Cévennes, entraîne progressivement le transfert de l’activité vers le Bousquet d’Orb. La commune de Camplong, située entre les concessions de Saint-Gervais, du Devois de Graissessac et celle du Ruffas, devient alors une plaque-tournante dans l’exploitation du bassin houiller. Cette situation est amplifiée par le développement des travaux en découverte à partir de 1956. Toutefois, ces chantiers n’emploient plus que 150 à 200 ouvriers.
Les sites d’extraction sur la commune de Camplong
A Camplong, les faisceaux houillers sont exploités, à partir du 18e siècle, depuis les flancs du vallon de l’Espaze. La rive droite est la première à être attaquée (mine Sainte-Marguerite). Ces galeries, de faible ampleur, se multiplient au début du 19e siècle (mine Poupon, mine Saint-Etienne, mine Adèle). Elles sont creusées soit dans la roche, soit directement dans la couche de charbon. Tandis que les pentes de la rive gauche de l’Espaze ne comptaient que la mine de la Goutine, à partir du milieu du 19e siècle, l’extraction s’étend à ce secteur (mine de la Couche au Mur, mine Sabatier, mine Amélie). Au fur et à mesure de l’exploitation, les entrées de mines descendent dans la vallée (mine de la Vigne Cave). Puis, à partir du début du 20e siècle, un nouveau secteur est mis en exploitation, celui de Vignères, situé au nord de Vigne Cave. L’exploitation de la rive gauche perdure jusqu’au milieu du 20e siècle (mine Vignères, mine de la Vigne Cave, mine de la Goutine, mine Amélie). A cette date, les travaux en découverte se substituent aux travaux souterrains.
Les techniques d’exploitation suivent les évolutions communes à l’ensemble du bassin houiller. Les galeries d’extraction ayant atteint les fonds de vallée, il a fallu foncer des puits pour accéder aux faisceaux. Deux puits sont foncés sur le territoire communal de Camplong, tous deux situés sur la rive droite de l’Espaze : le puits Durand à partir de 1873 et le puits Sans en 1888. Ce dernier n’a jamais été le siège d’une exploitation. Foncé sur une profondeur de 145 m, il a servi à la reconnaissance du faisceau de Castelnau. Au contraire, le puits Durand a servi à la fois à l’extraction de fonds, puis à l’évacuation des produits vers le carreau Debay au Bousquet d’Orb. Les équipements de surface ont parfois formé des carreaux autour des entrées de mine, comprenant notamment les bâtiments de la recette du jour et du ventilateur (carreau de la mine Amélie, carreau de la Vigne Cave, aujourd’hui détruits). Une fois les mottes collectées et grossièrement triées, elles étaient transportées jusqu’aux centres de traitement de Graissessac.
Tandis que le chemin de fer intérieur a fait son apparition, sur la concession de Boussagues, dès 1849, les premiers équipements ferroviaires au jour sont apparus à partir des années 1860 : un plan incliné est installé à la mine Poupon en 1865. Puis au début des années 1880, un plan aérien (aussi appelé « pont aérien », nom donné par la suite au stade de football) relie les mines de la rive gauche à la mine Poupon, sur la rive opposée. A cette époque, le transport à dos de mulets est remplacé par une voie étroite souterraine qui, partant des environs immédiats du puits Durand, débouche à l’entrée de mine Saint-Joseph, sur la commune de Graissessac. Enfin, certains équipements de surface sont mis au service du personnel. Ainsi, sur la rive gauche de l’Espaze, un remonte pente (appelé « télé-mine » par les mineurs) facilite la montée des mineurs jusqu’aux mines de la Goutine et Amélie.
Les galeries des deux rives de l’Espaze, de section réduite (3 à 5 m² de section) se sont souvent effondrées, suite à leur abandon. Les travaux en découverte ont surtout détruit les retours d’air et cheminées d’aérage situés sur les sommets et pris dans les découvertes de Rive-Gauche-Padène et de Cap Nègre. Les galeries d’exploitation ont donc laissé peu de vestiges. Leur entrée n’était vraisemblablement pas toute maçonnée en pierre de taille, comme celles observées sur le territoire de Graissessac ou du Bousquet. Nous n’avons retrouvé aucune entrée monumentale à Camplong.
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Les vestiges de l’activité minière à Camplong
Sur le territoire communal de Camplong, les vestiges de l’activité minière sont ténus, la plupart des sites d’extraction anciens ayant été détruits par les travaux des découvertes. Lorsque les galeries des premières mines n’ont pas été reprises par l’exploitation à ciel ouvert, elles se sont souvent effondrées du fait de leur faible profondeur (Vigne Cave, La Vignière). D’autre part, la ville n’a jamais été un centre de traitement du minerai : elle n’a jamais compté de lavoir ou d’usine de transformation du minerai. Du fait de l’implantation du village dans la vallée étroite de l’Espaze, de l’organisation groupée des habitations et de l’absence de fait de l’arrivée du chemin de fer aux portes du village, Camplong n’a pas connu le développement industriel observé à Graissessac ou au Bousquet d’Orb. Les sièges de décision ont été implantés dans ces dernières communes qui regroupaient à la fois sites industriels et voies de communication. De même, la commune n’a pas été marquée par les programmes de construction de logements ouvriers, entre les années 1920 et 1940 développés, à Graissessac et au Bousquet d’Orb. Camplong est resté un maillon dans l’exploitation du bassin sans devenir une cité minière.
Cependant, la qualité des vestiges sauvegardés est à souligner. Le chevalement du puits Durand est le seul à avoir été conservé sur l’ensemble du bassin houiller de Graissessac qui en en a comptés 7. Il est même le seul sur l’ensemble du territoire du Parc naturel régional du Haut-Languedoc qui englobe également les mines d’anthracite du Minervois.
De même, le bâtiment des anciennes douches et lampisterie est remarquable du fait de sa qualité architecturale. Ses formes et son organisation sont propres aux bâtiments utilitaires construits après guerre. Il forme un ensemble cohérent avec le bâtiment des douches de Graissessac et celui du Bousquet ainsi que les cités ouvrières Lassère et Vincent (Le Bousquet d’Orb) et Maison neuve et Sapinettes (Graissessac). Le Grand Café, café des mineurs, est quant à lui digne d’intérêt pour son état de conservation. Ces deux édifices constituent des vestiges à part entière de l’activité minière à Camplong. Il convient de prendre en compte ces édifices dans la présente étude, mais également de les préserver en tant que témoignages de l’histoire minière de la commune.
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* Extrait de la publication : Parc naturel régional du Haut-Languedoc
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